Vous n`avez pas honte? Evelyn Hecht-Galinski Traduction Christiane Reynaud

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Vous n’avez pas honte?

 

 

Evelyn Hecht-Galinski

Commentaire du 29 août 2018

Texte original : https://www.sicht-vom-hochblauen.de/schaemt-euch-von-evelyn-hecht-galinski/

Traduction : Christiane Reynaud

 

Un plaidoyer personnel pour les Juifs qui ont honte et qui se haïssent eux-mêmes

Vous n’avez pas honte ?

 

Aujourd’hui en 2018, il est grand temps que les citoyens juifs du monde entier aient honte des crimes de « l’État juif », ceux qui ne prennent pas leurs distances et s’identifient à lui. Mais il ne suffit pas d’avoir honte, il faut que des actes suivent. Donc, si Daniel Barenboïm a aujourd’hui honte d’être Israélien c’est une bonne chose – et un premier pas. Mais quelles conséquences va-t-il en tirer ? Continuera-t-il à participer au festival de Jérusalem ? Rendra-t-il son passeport israélien en signe de protestation ? Ou se contentera-t-il de quelques articles dans les journaux ?

 

Soutien aveugle de l’injustice

Mais tant que le Conseil central des Juifs et son président Schuster, ainsi que les représentants et responsables de la communauté juive, n’ont pas honte, continuent à s’identifier aux crimes de « l’État juif » et exigent du gouvernement allemand une entière solidarité avec la puissance occupante israélienne, et tant que tout citoyen juif ou „chrétien sioniste“ n’a pas honte de son soutien aveugle à « l’État d’occupation juif », on peut être sûr que le soutien aveugle de cette injustice crée un antisémitisme (voulu ?) qui n’a rien à voir avec le vrai antisémitisme mais seulement avec une critique justifiée de « l’État juif » et de son effroyable politique.

N’oublions pas les faits concrets par exemple de la politique criminelle de cet État et de son blocus terrestre, maritime et aérien de la bande de Gaza en violation du droit international. Cette punition collective pour les environ 2 millions de Palestiniens qui doivent vivre enfermés dans cette immense prison à ciel ouvert unique au monde, ce martyre entre déjà dans sa douzième année sans que la communauté internationale hypocrite y prête attention, alors qu’elle ouvre tout grand la bouche quand elle flaire une injustice ailleurs. https://diefreiheitsliebe.de/kultur/palaestina-und-das-voelkerrecht/

Un vendredi après l’autre, des Palestiniens désespérés tentent de démontrer leur résistance et protestent à la barrière de Gaza avec leur « marche du retour » à laquelle des tireurs d’élite de l’armée de défense d’Israël répliquent brutalement avec des assassinats ciblés ; ils ne reculent ni devant les civils, les femmes et les enfants, ni devant les secouristes ou les journalistes. Le régime de Netanyahou tente de rendre définitivement infernale la vie déjà difficile des Palestiniens par un développement intense des colonies juives, la destruction de l’infrastructure palestinienne, la suppression de la liberté de mouvement déjà pratiquement inexistante, la séparation de Jérusalem-Est illégalement annexée et de la Cisjordanie illégalement occupée, le mur de l’apartheid.

Alors que des milliers de Palestiniens sont maintenus en détention administrative sans inculpation ni procès, et que certains font la grève de la faim pour protester contre cette injustice, les mauvais traitements et la torture – même pour des adolescents – sont à l’ordre du jour. Les responsables de ces actes restent impunis. On continue de détruire des maisons palestiniennes, d’expulser leurs habitants, de faire des raids nocturnes, d’arracher des enfants, même petits, de leur lit et de les séparer de leurs parents. Je joins à ce sujet le rapport détaillé et choquant d’Amnesty International 2017/2018 – même lui n’a pas été digne du plus petit article dans les grands médias.                                          https://www.amnesty.de/jahresbericht/2018/israel-und-besetzte-gebiete

Le ridicule reproche de la « haine de soi juive »

Je ne me souviens encore que trop bien quand, en 2008, « l’historien tardif » et lobbyiste pro-israélien convaincu Arno Lustiger que j’avais encore connu en tant que « Juif Schmattes », c’est-à-dire un fabricant juif de manteaux, nous a accusés, l’estimé Alfred Grosser et moi, de « haine de soi juive » dans un article du journal FAZ. http://www.faz.net/aktuell/feuilleton/debatten/hecht-galinski-antwortet-auf-lustiger-antisemitismus-ist-nicht-gleich-antizionismus-1692530.html                                                                                              

L’ancien vice-président du Conseil central des Juifs d’Allemagne, Salomon Korn, dont le père jouait encore un rôle de premier plan dans le milieu de Francfort, m’a, lui aussi, accusée de « haine de soi juive » en 2008. Tout cela ne peut être considéré que comme une réponse ridicule et embarrassée à ma critique justifiée du Conseil central en tant que « porte-parole bruyant d’Israël » qui soupçonne d’antisémitisme tout critique d’Israël. A cette époque, il y avait encore des ministres courageuses du parti socialiste SPD comme Heidemarie Wieczorek-Zeul, la « rote Heidi » (Heidi rouge) à laquelle je suis vite venue à l’aide car elle avait osé exiger une enquête de l’ONU sur l’utilisation d’une grande quantité de bombes à sous-munitions au Liban par l’armée de l’air israélienne (« bombardiers de défense » juifs à l’étoile de David). Le reste de plus de 100 000 munitions non explosées dangereuses se trouve encore aujourd’hui dans le sol comme souvenirs „juifs“ et mettent constamment les civils libanais en danger. Qui en parle encore aujourd’hui ? Le „boucher du Liban“, l’ancien Premier ministre Ariel Sharon, avait accusé les critiques d’Israël d’antisémitisme, après tout, c’était le „seul“ Etat juif.

Grâce au régime de Netanyahou, à ses prétentions et sa sommation aux Palestiniens de reconnaître Israël en tant « qu’État juif », cette exigence s’est avérée totalement indiscutable et heureusement inacceptable pour tout Palestinien et même pour tout Juif critique.

Avoir honte d’être un Israélien

En effet, nous, les citoyens juifs critiques du monde entier et les Palestiniens, nous avons tous le même objectif et depuis longtemps renoncé au soi-disant « droit de retour » des Juifs dans « l’État juif », comme les intellectuels juifs éminents tels que Judith Butler, Noam Chomsky et Norman Finkelstein. Entre-temps, même Daniel Barenboim a honte d’être israélien.

En 2018, depuis que le parlement israélien, la Knesset, a adopté une loi raciste d’apartheid national, l’État juif s’est définitivement disqualifié en tant que „seule démocratie“ au Proche-Orient.

Comment un gouvernement allemand qui défend toujours avec véhémence les « valeurs » peut-il continuer à soutenir un État qui désigne de son propre chef tout Jérusalem comme capitale « éternelle » d’un « État juif » ? En fin de compte, Jérusalem-Est a été illégalement occupée en 1967. Comment peut-on déclarer unilatéralement le symbole de l’oppression, le drapeau à l’étoile de David, la hatikvah, l’hymne national juif, le calendrier hébraïque, les jours fériés juifs et l’hébreu comme symboles d’État, considérer seulement l’essor des communes juives comme valeur nationale et, de cette façon, exclure toutes les minorités ?

Israël enterre les valeurs démocratiques

Lorsque le Premier ministre Netanyahu a parlé d’un „moment clé“ dans l’histoire du sionisme et de l’État d’Israël, il a proclamé définitivement la mort des valeurs démocratiques et a donné naissance à l’ethnocratie juive de l’apartheid. C’est la tentative ultime d’effacer l’identité palestinienne et de légaliser le racisme juif.

Il ne suffit donc plus que l’UE et Federica Mogherini se montrent « inquiètes » de la nouvelle loi et réclament la démocratie et l’égalité aussi pour les minorités comme valeurs fondamentales qui définissent nos sociétés ou que la chancelière Merkel fasse, dans son interview estival du dimanche sur la chaine ARD, référence à la protection des minorités qui est ancrée dans notre Loi fondamentale mais qu’elle refuse de se mêler des affaires intérieures de « l’État juif » et permet, par contre, à ses représentants de se mêler constamment de nos affaires « intérieures ».

70 ans de fausse solidarité après le début de la Nakba, la catastrophe palestinienne, avec un État qui, depuis l’occupation illégale en 1967, s’empare de nouvelles grandes parties de la Palestine, cela suffit !

Par l’occupation israélienne de la Palestine, sa brutalité inhumaine, sa déshumanisation et diabolisation des Palestiniens, Israël a perdu tout scrupule de massacrer des Palestiniens et prétend en avoir le droit contre des « terroristes inférieurs ». La société israélo-juive est ainsi convaincue de sa « prétention de représentation exclusive » de la Palestine. Elle n’a pas honte de ne jamais rencontrer les Palestiniens sur pied d’égalité et de s’être installée confortablement en continuant de soutenir ce régime d’apartheid raciste et cet Etat de colons extrémistes.

Les « vrais amis d’Israël » doivent s’élever contre la politique d’injustice !

S’il y a vraiment encore de « vrais amis d’Israël », ils devraient alors se soulever et enfin exiger la fin de cette politique d’injustice.

A nous tous qui nous engageons avec tant de véhémence pour un État palestinien démocratique, qui plaidons pour un État où tous les citoyens sont d’égal à égal – sans différences ni restrictions -, qui soutenons le mouvement BDS de toutes nos forces, nous nous sentons bassement abandonnés par la politique mensongère de la soi-disant « communauté de valeurs ». Ce n’est pas nous qu’il faut combattre mais les politiciens et les fonctionnaires juifs qui soutiennent aveuglément cet « État juif d’apartheid », ivres d’une béatitude judéophile.

La communauté internationale hypocrite devrait avoir honte et se haïr elle-même de ne pas enfin être prête à agir et à prendre des mesures pour protéger le peuple palestinien – y compris le mouvement BDS – afin d’assumer sa responsabilité en vertu du droit international et de défendre les droits de l’homme en Palestine occupée illégalement tant que « l’État juif » viole le droit international humanitaire en vigueur.

Laissez-moi finir mon plaidoyer avec l’inégalé Erich Fried. On ne peut pas formuler des appels de façon plus appropriée que ce poète génial.

Erich Fried : Israel

https://www.friedenskooperative.de/friedensforum/artikel/erich-fried-ein-unbequemer-dichter

Le recueil de poèmes « Höre Israel » (1972) déclencha en Israël et aussi en Allemagne d’intenses discussions où Fried a été accusé de ne pas se prononcer en tant que Juif pour l’État d’Israël, de cultiver la haine de soi juive ou même d’adhérer à un antisémitisme caché. Dans l’introduction, il se penche en détails sur les accusations :

„Seit dem Judenmord des Hitlerfaschismus hat in Westeuropa ein begreifliches kollektives Schuldgefühl oft dazu geführt, dass man sich jede Kritik an Juden verbietet, wobei man noch dazu Juden und Zionisten meist kurzerhand gleichsetzt. Ich aber empfinde außer Solidarität mit allen unschuldig Verfolgten und Benachteiligten auch etwas wie Mitverantwortlichkeit für das, was Juden in Israel den Palästinensern und anderen Arabern tun; auch für das, was sie in aller Stille jenen Juden antun, die dagegen kämpfen und protestieren … Mein Wirkungsbereich ist durch meine deutsche Muttersprache bestimmt, aber das Schicksal der Juden ist mir keineswegs gleichgültig. Ich hoffe sogar, auch ohne jüdisches Volksbewusstsein oder israelisches Nationalgefühl, sozusagen nebenher, ein besserer Jude zu sein als jene Chauvinisten und Zionisten, die, was immer ihre Absicht sein mag, in Wirklichkeit ihr Volk immer tiefer in eine Lage hineintreiben, die schließlich zu einer Katastrophe für die Juden im heutigen Israel führen könnte. Auch dagegen möchten – durch Warnung vor dem Irrweg und durch allerlei Informationen – diese Gedichte kämpfen.“

Il évoque ensuite des errements en termes très concrets dans le poème « Höre Israel » : (Écoute Israël)

„…ich spreche als einer von euch/ der auch Irrwege kennt// In den Gaskammern und in den Öfen/ wo eure Familien vergingen/ wurden auch meine Verwandten/ vergast und verbrannt// Seither kämpfe ich gegen das/ was dahin geführt hat/ gegen die Mächte/ die Hitler zur Macht verhalfen// Sie sind noch nicht verschwunden/ von dieser Erde/ und was tut ihr?/…Ich wollte nicht/ daß ihr im Meer ertrinkt/ aber auch nicht dass andere durch euch/ in der Wüste verdursten// Als ihr verfolgt wurdet/ war ich einer von euch/ Wie kann ich das bleiben/ Wenn ihr Verfolger seid?

Sa plainte sur la politique atteint peut-être son paroxysme dans le poème « Eure Toten » (Vos morts). Il accuse Israël d’instrumentaliser la Shoah et compare les victimes de l’Holocauste avec les victimes palestiniennes de la politique d’Israël : une violation du tabou sans précédent qui lui ont valu des réactions agressives de la part d’Israël et des organisations et groupes juifs du monde entier. Il s’adresse aux Juifs du point de vue des Palestiniens :

„…eure toten Eltern und Großeltern/ eure toten Brüder und Schwestern/ auf die ihr euch immer beruft/ eure Toten die euer Trumpf sind/ eure Toten für die ihr euch Geld bezahlen laßt/ als Wiedergutmachung/ sie sind nicht mehr eure Toten/ Ihr habt eure Toten verloren/ denn eure Toten/ das waren die Opfer der Mörder/ die Gerechten die Unterdrückten…Jetzt aber seid ihr Machtanbeter und Mörder geworden/ und werft Bomben auf eure Opfer wenn sie sich wehren/ Ihr vertreibt die Machtlosen aus ihren niederen Hütten/ Ihr kommt rasselnd in rasenden Panzern/ Ihr laßt das Sprühgift/ aus euren Flugzeugen regnen/ nieder auf unsere Felder/ und euer Napalm auf unsere Frauen und Kinder… Eure Toten sind nun zu Gast bei unseren Toten.“

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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